On a vu avec Alcméon que la famille maudite s'était rachetée du massacre de -632. Les victoires militaire et olympique du fils de Mégaclès prouvèrent que les athéniens et les dieux avaient pardonné l'acte odieux des Alcméonides. Dès lors, rien ne semblait s'opposer à leur retour sur le devant de la scène politique de la cité.

Le retour à Athènes

Le contexte politique de la cité avait quelque peu changé au début du sixième siècle. Les réformes entreprises par Solon furent qualifiées de démocratiques par Aristote (IX), mais sans doute faut-il y voir une tentative de limiter les pouvoirs des grandes familles aristocratiques sur un peuple dominé plutôt qu'une véritable participation du démos dans la vie politique d'Athènes. Les nouvelles lois sur les tribunaux, lois qui semblaient diminuer le rôle des grands nobles, permirent probablement à la famille maudite de revenir sur ses terres. En effet, on l'a vu plus haut, il est peu crédible de penser que Solon provoqua l'exil des Alcméonides comme le prétendit Plutarque ; au contraire il est probable que son archontat, marqué par son opposition aux plus grandes familles de l'Attique, donna l'occasion à Alcméon et aux siens de regagner leurs terres.

Le départ de Solon, après -593, laissa la cité dans un certain état de trouble. La seisachteia entreprise par l'homme politique n'avait satisfait ni les familles puissantes, qui voyaient là une atteinte à leur droit de propriété, ni les paysans qui n'avaient pas obtenu un vrai partage égalitaire du sol. Aristote raconte les difficultés de la vie politique après Solon (XIII) : double archontat de Damasias, élection de dix archontes - information dont on peut douter de la véracité. Ces troubles politiques durèrent jusqu'en -561, date de la première tyrannie de Pisistrate.

Hérodote ( I, 59) et Aristote nous présentent alors deux partis en lutte : celui de Lycurgue, favorable à une oligarchie, constitué essentiellement des Pédiens. On a voulu y voir les grands propriétaires terriens du centre de l'Attique. Le second parti était sous la conduite de Mégaclès, fils d'Alcméon. Il regroupait les gens de Paralie, sans doute les habitants de la côte ayant des activités maritimes. Les deux auteurs insistent sur la politique modérée de cette faction, mais en quoi fut-elle modérée ?

Aucune information sur les orientations de cette faction ne nous est transmise ; le groupe de Mégaclès ne cherchait certainement pas à établir un régime démocratique à cette époque. Pensons plutôt au maintient des réformes de Solon qui devaient restreindre la puissance des plus grandes familles. Mégaclès avait deux arguments pour légitimer sa présence politique. Tout d'abord il était le fils du sauveur de Delphes, issu d'une famille riche et puissante, attachée depuis longtemps à la vie de l'Attique ; puis son mariage avec la fille du tyran Clisthène de Sicyône, Agaristè (Hdt VI , 130) en faisait l'un des hommes les plus estimés dans tout le monde grec.

On ne sait comment s'affrontaient les deux groupes ; on ne sait non plus s'ils étaient vraiment composés d'habitants de la plaine pour le parti de Lycurgue et des côtes pour celui de Mégaclès : peut-être les noms des deux factions venaient-ils simplement des régions où leurs chefs vivaient et avaient recruté leurs clientèles respectives. Sur ce , un troisième individu du nom de Pisistrate voulut s'interposer entre les deux factions ; l'homme rassembla autour de lui les mécontents, les pauvres, les déçus de la politique. Chef de guerre victorieux à Nisée, son prestige joua certainement dans sa réussite à constituer une troisième tendance. Il n'est pas question ici de retracer dans tout les détails les tyrannies successives de Pisistrate , mais de mettre en évidence le rôle de Mégaclès dans les successions d'événements lors du règne du tyran.

Tout d'abord, les deux auteurs anciens mentionnent que la première tyrannie dura six ans, de -561 à -555 ; le tyran se concilia le peuple, prit l'Acropole (l'histoire bégaie parfois) et s'établit en chef de la cité, apparemment sans trop d'opposition de la part des deux autres factions. Son gouvernement, de l'avis d'Aristote (XVI) fut plutôt sage et bon, Pisistrate administrant la cité plus comme un citoyen qu'un tyran. Mais en -555 , les deux autres partis se liguèrent pour le chasser d'Athènes. Rien n'indique ce qui poussa Lycurgue et Mégaclès à se réunir contre le Diacrien, et l'on ne peut qu'émettre des hypothèses à ce sujet : désir de se débarrasser d'un régime qui, favorisant trop les Athéniens les plus démunis, faisait craindre aux aristocrates une perte de leurs privilèges ? Toujours est-il que le tyran dut quitter la cité sous la pression des deux partis , on ne sait où il se réfugia. Mais les vieilles dissensions politiques reprirent à Athènes entre les oligarques et les modérés, et c'est ici qu'intervient un fait curieux. En effet, Hérodote et Aristote racontent que Mégaclès lui-même contacta Pisistrate pour le faire revenir à Athènes. Etrange action pour un homme qui avait fortement contribué à la chute du tyran ! Les raisons qui poussèrent à cette alliance nous échappent : peut-être était-ce le seul moyen pour l'Alcméonide de mettre au pas son adversaire Lycurgue ? Ou bien désirait-il se concilier les pauvres et les humbles ? Le prix à payer par le tyran pour cette aide inespérée fut le mariage avec la fille de Mégaclès, une alliance politique qui devait resserrer les liens entre les deux partis. Le retour du tyran dans la cité se fit à grand renfort de mise en scène, puisque Pisistrate se fit accompagner par une jeune femme déguisée en Athéna, qui abusa les Athéniens et permit de légitimer la deuxième prise du pouvoir ( -544 ).

Mais l'alliance entre Mégaclès et Pisistrate ne dura pas. Ce dernier, qui avait déjà des enfants d'une première femme, refusait de s'unir à sa nouvelle épouse, prétextant ses origines maudites depuis l'affaire de Cylon. Au-delà de l'anecdote, c'est probablement la crainte d'une collaboration trop étroite avec les Alcméonides coupables ( ou trop influents ?) qui provoqua la rupture entre les deux partis alliés. Pisistrate dut quitter de nouveau Athènes ( -538 ) pour échapper au courroux de Mégaclès et il se réfugia en Erétrie où il put amasser une grande fortune en se faisant payer pour des "services " rendus à des cités grecques (Hdt I, 61). Il constitua une armée et put revenir en force en Attique. Son débarquement à Marathon en -534 fut suivi par une bataille contre ses opposants, à la tête desquels les Alcméonides devaient certainement se trouver. Cette bataille près de Pallène vit le tyran victorieux et les coalisés éliminés. L'affrontement n'était plus le même que lors de la première tentative de -561 : il ne s'agissait plus d'une opposition entre factions aristocratiques, mais entre des dèmes urbains d'une part, constitués en grande partie de nobles et de leurs clientèles directes, et des dèmes ruraux d'autre part, rassemblant les paysans de l'Attique qui devaient voir en Pisistrate un libérateur face au joug de la noblesse. Le tyran démagogue, ennemi des aristocrates, voilà ce que semble avoir été le portrait de Pisistrate.

Devant le succès de leur ennemi, les Alcméonides choisirent l'exil. L'attitude de Mégaclès durant toutes ces années fut pour le moins étonnante : d'abord opposant farouche, puis allié, puis de nouveau opposant ... Le fils d'Alcméon ne fut-il qu'un opportuniste, prêt à toute compromission pour conserver des bribes de pouvoir et d'autorité ? On est bien loin de la description élogieuse qu'en fit Hérodote. Les raisons de ces revirements sont obscures. On a dit que l'alliance pouvait être le moyen de former un seul parti fort face au groupe oligarchique de Lycurgue. On peut également évoquer le désir de se concilier par l'intermédiaire du tyran la masse des mécontents de l'Attique. Mais alors, pourquoi avoir poussé Pisistrate à l'exil en -538 ? Le mariage avec la fille de Mégaclès en dit long sur les compromis auxquels Mégaclès était prêt pour se rapprocher du tyran. Mais malheureusement il nous est impossible de comprendre les vrais raisons de ces alliances, les auteurs antiques ne racontant que peu de détails sur ces troubles, et faisant de plus preuve d'une certaine partialité envers les Alcméonides. Sans doute ne saurons-nous jamais quels furent les motifs de l'entente ratée entre les deux hommes.

Après le désastre de Pallène, les Alcméonides préférèrent fuir le nouveau régime du tyran et quittèrent l'Attique. Et nul ne nous raconte où eut lieu leur exil. Mais nous pouvons nous en douter, au vu et su des événements antérieurs et de quelques découvertes archéologiques.

Delphes

Le sanctuaire d'Apollon était cher aux Alcméonides depuis l'affaire de Cylon. Il semble logique que la famille s'y réfugia lors de son exil à la suite de la prise du pouvoir par Pisistrate. De plus, le génos était fort impliqué dans la reconstruction du temple. En effet, l'ensemble du site avait été ravagé par un incendie en -548/547. La famille fut probablement très affectée par cette catastrophe et décida de participer à la reconstruction. L'attachement des Alcméonides à Delphes et à Apollon est notamment confirmé, s'il en était besoin, par une inscription trouvée à Thèbes sur le chapiteau d'une colonne votive (L. Bizard, " Inscriptions du Ptoïon ", BCH XLIV ( 1920 ), p. 227). Cette dédicace est faite par Alcméonidès fils d'Alcméon à Apollon à la suite d'une victoire du quadrige de l'Alcméonide aux Panathénées de -546 ; on peut d'ailleurs se demander si cette colonne qui supportait une statue du dieu ne fut pas offerte à Thèbes pour se concilier les Béotiens contre les Pisistratides...

Les Alcméonides ne restèrent pas très longtemps à Delphes : on sait par une inscription que Clisthène fut archonte en -525/24 ; cela prouve qu'un rapprochement avec les fils de Pisistrate eut lieu. Mais il semble que les oppositions se maintinrent entre les deux groupes, jusqu'à un nouvel exil de la famille vers -514 après le meurtre d'Hipparque. La famille tenta bien un retour à Leipsydrion en -513 : une place forte en Attique fut prise par les partisans des Alcméonides, mais les Pisistratides en firent le siège et les descendants de Mégaclès durent renoncer à un nouveau retour dans la cité, et reprirent le chemin de l'exil . Leur dernier recours pour conquérir le cœur des Athéniens se présenta sous la forme d'un acte religieux...

Pour comprendre, il faut repartir à Delphes, détruite donc en -548/47 ; il semble que dans un premier temps les travaux consistèrent à réaménager le site par le déblaiement des ruines, puis l'organisation des lieux de culte ( vers -539 ). Le temple d'Apollon, quant à lui , semble avoir été construit plus tardivement . Mais à quel date ? Nous nous baserons ici sur les travaux de Pierre de La Coste-Messelière et de William A.P. Childs pour mieux comprendre le rôle de la famille dans la reconstruction de Delphes (P. de La Coste-Messelière, " Les Alcméonides à Delphes", BCH LXX (1946) pp. 271-287 et W.A.P. Childs, " Herodotos, archaïc chronology, the Temple of Apollo at Delphi ", JDAI 108 (1993) pp.399 à 441). Il semble bien que la construction a débuté aux alentours de -514 , après la défaite de Leipsydrion comme l'indique Aristote (XIX). Les fonds pour les travaux furent collectés par les Alcméonides qui lancèrent une souscription. Sans doute l'argent permit-il, en plus de l'édification de la divine demeure, l'enrichissement personnel de ma famille. Peut-être cette anecdote est-elle à l'origine de l'histoire d'Hérodote concernant la visite des Lydiens à Delphes suivie par la fortune soudaine d'Alcméon ? Le fait de prendre la responsabilité de la construction du temple garantissait aux Alcméonides un grand prestige dans toute la Grèce et sans doute à l'étranger ; les dons devaient parvenir nombreux. Dès lors la famille put probablement non pas détourner mais emprunter les fonds disponibles. C'est ce que prétendent deux auteurs anciens. Isocrate dit que " Clisthène, après avoir été écarté d'Athènes par les tyrans, parvint par son éloquence à persuader l'amphictyonie à lui fournir l'argent du trésor d'Apollon, puis remit le peuple au pouvoir, expulsa les tyrans et établit la démocratie"(Antidosis, 15, 223). Démosthène raconte également que " [ les Alcméonides ] dont on dit qu'ils furent bannis par les tyrans pour leur appartenance à la faction démocratique, et qui, avec l'argent emprunté à Delphes, libérèrent notre cité , expulsant les fils de Pisistrate " (Contre Meidias, 21, 144). La relation entre la fortune accumulée par la famille durant son exil, la construction du temple de Delphes et le retour définitif à Athènes est ainsi bien établie.

Selon Pierre de La Coste-Messelière, les Alcméonides contribuèrent surtout à la construction de certaines parties du temple : les frontons, frise et épistyle, les chapiteaux... La construction se serait étalée entre -514 et -505. Les Alcméonides ont sans doute également contribué aux parures et décorations du site avec des statues. La plus mystérieuse d'entre elles reste probablement une œuvre disparue, dont il ne reste que le support signé par le sculpteur Anténor. Or nous connaissons cet artiste par Pausanias qui le présente comme l'auteur des statues des Tyrannicides (Description de l'Attique, Livre I , 8, 5) et par une autre statue trouvée sur l'Acropole : la Korè d'Anténor (voir les illustrations). W. Childs émet l'hypothèse que cette œuvre aurait pu être faite à Delphes pour orner le fronton Est du temple, puis offerte (ou commandée ?) à Clisthène pour célébrer la réussite des Alcméonides dans leur lutte contre les tyrans. Mais ces interprétations sont soumises à trop d'hypothèses et d'arguments circulaires, note l'auteur, pour être considérées comme certaines.

Il propose une chronologie des événements qui suivirent le départ des Alcméonides après Pallène : la voici, augmentée de quelques dates supplémentaires :

-538 : Mégaclès et Clisthène quittent Athènes à la suite de la défaite de Pallène

-530 : début de la construction du temple (fondations et sculptures ornementales dont la Korè par Anténor)

-527 : mort de Pisistrate ; Clisthène revient à Athènes

-524/524 : archontat de Clisthène

-514 : meurtre d'Hipparque ; exil des Alcméonides.

-513 : bataille de Leipsydrion ; contrat des Alcméonides pour l'achèvement de la reconstruction du temple d'Apollon.

-510 : renversement des Pisistratides ; alliance des Alcméonides avec Sparte.

Outre l'enrichissement personnel de la famille dans cette entreprise, les Alcméonides tirèrent deux avantages de leurs activités à Delphes. Tout d'abord la reconnaissance de toute la Grèce admirative devant l'œuvre de piété de la famille. Ceci est illustré par une phrase de Pindare tirée de la Septième Pythique (vers 9 à 13) : " Toutes les cités connaissent les concitoyens d'Erechtée qui, dans la divine Pythô ont construit, Apollon, ta demeure admirable ". Mais ils obtinrent également la reconnaissance du clergé du sanctuaire, désormais acquis à la cause de Clisthène. Et celui-ci devait profiter de cette aide inespérée pour parfaire sa carrière politique.

Clisthène

Nous ne connaissons pas la date de naissance du fils de Mégaclès ; mais en supposant, comme J.K. Davies que l'union entre Agaristè et le fils d'Alcméon eu lieu vers -570, il devait avoir près de soixante ans lors de la chute d'Hippias. Les circonstances de son retour à Athènes sont connues (Hdt V, 66 , 70 sqq. ; Art XX) : après la mort d'Hipparque, le gouvernement de son frère devint plus dur et insupportable aux Athéniens. Mais étrangement le démos semble s'être tenu à l'écart des troubles qui agitèrent la cité en -510. Isagoras et Clisthène s'entendirent pour faire appel au roi de Sparte Cléomène afin de chasser le jeune tyran. Et lorsque le roi se rendit à Delphes pour consulter la Pythie , celle-ci abonda dans le sens des Alcméonides. Elle devait tant à la famille qu'elle ne pouvait refuser de l'aider en influençant Cléomène. L'intervention des Lacédémoniens eu pour résultat de chasser le fils de Pisistrate et de laisser la place pour un nouveau régime. Et une fois de plus deux factions devaient s'affronter pour le pouvoir. D'une part Isagoras, fils de Teisandre, chef de file des aristocrates dans la droite ligne de Lycurgue ; c'est lui qui avait fait appel à Cléomène pour libérer la cité du tyran. D'autre part, Clisthène, l'homme qui avait la reconnaissance de la Pythie. Il ne semble pas avoir été naturellement à la tête d'un groupe politique, mais Hérodote et Aristote indiquent qu'il se tourna vers le peuple pour asseoir son autorité (Hdt V, 66 ; Art XX). Isagoras et le parti aristocratique, trop faibles pour se débarrasser de Clisthène, firent de nouveau appel à Cléomène pour chasser une fois de plus un adversaire politique. A cette occasion est rappelé le crime des ancêtres et la malédiction qui pèse sur le génos. Mais le peuple, rallié à l'Alcméonide, assiège les aristocrates installés sur l'Acropole ; l'histoire bégaie toujours, après Cylon et Pisistrate, mais ne se répète pas, Clisthène fit cesser ce siège et les partisans d'Isagoras purent fuir avec les Lacédémoniens. La place était désormais libre pour qu'un Alcméonide puisse enfin devenir l'homme fort de la cité.

On voit ici que Clisthène n'avait pas de sentiment particulier à l'égard du démos : son choix semble surtout politique et opportuniste. Les propos de Hérodote (V, 66) et d'Aristote (XX) sont clairs à ce sujet : l'Alcméonide choisit de "faire entrer le démos dans son hétairie" non par amour d'une population humble, mais parce qu'il n'avait pas d'autre solution pour constituer une force politique importante. Clisthène n'était certainement pas l'homme providentiel qui devait libérer la cité du joug des tyrans, mais un chef charismatique qui sut se concilier habilement la foule des Athéniens. Démagogue, tyran en puissance, il décida néanmoins de suivre une nouvelle voie politique.

Nous ne reviendrons pas ici sur les réformes entreprises par Clisthène - l'incontournable Clisthène l'Athénien de P. Lévêque et P. Vidal-Naquet est la référence sur ce sujet (voir bibliographie) - ni sur l'instauration du régime isonomique.Mais leur sens est bien particulier : en divisant l'Attique en nouvelles circonscriptions, il élimina les rapports entre une aristocratie terrienne et ses clientèles locales. Son nouveau découpage (voir carte dans la rubrique illustrations) permet la disparition des particularismes locaux en brisant les anciennes entités régionales tout en renforçant l'unité d'Athènes : Clisthène, véritable auteur du synoecisme attribué à Thésée ? Certains ont pensé que la distribution des charges politiques n'était pas égalitaire et privilégiait les dèmes acquis aux Alcméonides : c'est notamment l'avis de P.J. Bicknell (voir Bibliographie) qui avance l'argument que certains quotas bouleutiques furent délibérément établis pour sous-représenter les dèmes opposants à Clisthène et sur-représenter ceux favorables aux Alcméonides. Cette idée est séduisante, car elle correspond bien à l'idée d'un manipulateur politique qui cherche avant tout à évincer ses adversaires politiques en faisant appel à un semblant de démocratie. N'était-ce pas là le but de l'ostracisme institué par le fils de Mégaclès ? Toutefois des preuves incontestables d'un découpage truqué manquent, les informations sont trop éparses pour pouvoir affirmer la véracité des dires de Bicknell. Nous ne pouvons nous contenter, ici encore, que de théories et d'hypothèses.

Après la fin des réformes en -508 nous perdons la trace de Clisthène : déjà âgé, il est probable que sa mort survint peu après. Son œuvre politique, l'invention de la démocratie grecque telle qu'elle est généralement évoquée, devait rester l'un des instants magiques de l'Histoire.